Centre de conservation du Québec
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Le calvaire du Lac-Bouchette

Le Calvaire du Lac Bouchette avant traitement. Six statues sont installées  sous un édicule en bois.Au Québec, les calvaires sont composés d'un ou de plusieurs personnages. Celui de l'Ermitage Saint-Antoine, à Lac-Bouchette, un sanctuaire au sud du Lac-Saint-Jean, en comprend six : le Christ en croix, la Vierge, saint Jean, Marie-Madeleine ainsi que les bons et mauvais larrons exposés à l'extérieur, dans un édicule en bois. Ces statues constituent le plus grand calvaire sculpté en bois au Québec. Ces œuvres en pin ont été sculptées par Louis Jobin, en 1918. On doit en outre leur polychromie d'origine, réalisée en 1924, au peintre Charles Huot.

Des dommages causés par les rigueurs du climat

Le Christ et les deux larrons sont accrochés à leur croix respective à l'aide de crochets métalliques. Les trois autres personnages sont fixés chacun à un socle et déposés directement sur le plancher de l'édicule.

Les six personnages ont subi, au fil des ans, de nombreuses réparations, parfois maladroites. Ils ont été recouverts de plusieurs couches de peinture, certaines surfaces ont été grattées avant l'application de couleurs. Au début du traitement, tous les personnages présentaient des fentes et des fissures en surface. La mise à l'écart des œuvres en hiver dans un milieu bien chauffé et très sec, contrastant avec l'humidité de la belle saison, avait accéléré leur dégradation. Il est en effet connu que les variations subites de température et, surtout, d'humidité provoquent des dommages au bois, un matériau organique et « vivant ».

La photo représente une partie de la pourriture située au dos de la statue de Marie-Madeleine.Malgré ses couleurs vives, la dernière peinture servait surtout à cacher du bois dégradé largement couvert d'un matériau de calfeutrage commercial. La base de la Vierge, du saint Jean et de la Marie-Madeleine était rongée par la pourriture. Les statues étaient fixées solidement à des socles faits de planches de bois à fil horizontal, alors que le bois des statues est à fil vertical. Le mouvement naturel du bois, lors des changements d'humidité, était en contradiction, créant des fissures qui favorisaient l'infiltration d'eau lors de pluies abondantes. Plus on cherchait à étanchéifier, plus on créait un milieu qui retenait l'humidité et accélérait la dégradation du bois.

Des cassures avaient auparavant été réparées de manière maladroite. Elles étaient situées pour la plupart aux doigts et aux orteils des bon et mauvais larrons. Le bout du nez de la Vierge avait probablement été cassé et refait avec du plâtre. Le résultat était médiocre et la réparation apparente. Les tiges d'acier qui fixaient les bras des crucifiés aux épaules étaient rouillées, tout comme une multitude de clous utilisés pour des réparations anciennes. En somme, les dommages étaient bien plus grands qu'il n'y paraissait à première vue.

Les défis des œuvres extérieures

Que ce soit pour des œuvres protégées dans un musée ou celles exposées aux intempéries, les objectifs de la restauration restent les mêmes : assurer la survie à long terme et mettre en valeur, voire redonner, l'authenticité aux œuvres. Dans le cas d'œuvres extérieures, le défi permanent consiste à les protéger des dommages causés par l'environnement, notamment par l'humidité, les insectes, la pourriture, etc., ce qui impose des traitements plus « agressifs » que pour des objets déposés dans les vitrines climatisées d'une exposition.

L'image montre les pièces de bois qui ont été mises en place sur la statue de Marie-Madeleine afin de remplacer les parties pourries.Pour les six statues de l'Ermitage Saint-Antoine, le traitement s'est amorcé avec l'extraction des vieux calfeutrages en élastomère, c'est-à-dire des matériaux de type élastique, omniprésents dans les joints et fissures du bois. Les joints et les fentes ont ainsi été nettoyés et leurs surfaces ramenées au bois propre. Les bases de la Vierge, du saint Jean et de la Marie-Madeleine ont été décapées, dans certains cas jusqu'à mi-hauteur du personnage. Tout le bois mis à nu a été imprégné d'une résine synthétique; les vides créés par la pourriture ont été comblés par un mélange de résine et des granules de bois. Les parties trop dégradées, surtout à la base et sur les vêtements, de même que certains dommages anciens, comme le nez de la Vierge, ont dû être sculptées dans du bois neuf.

Les fentes les plus larges ont été réduites avec des flipots de bois pour être ensuite calfeutrées avec un nouvel élastomère de haute qualité.

Une fissure est remplie par des flipots de bois; une bande de mousse de polyéthylène sert de base au nouveau calfeutrage qui sera bientôt appliqué.La statue de la Vierge après traitement. Elle est reconstituée en entier sans cassure ni pourriture. Par la suite viendra l'étape de la peinture.

Les joints d'assemblage ont profité d'un traitement semblable. Le principe est d'empêcher l'eau de pénétrer tout en permettant à l'humidité de sortir. De nouveaux socles, faits en pin neuf, permettent dorénavant l'aération adéquate sous les personnages. Toutes les vis et les tiges ont été remplacées par de l'inox.

Une fois bien protégés par une couche d'apprêt, les personnages ont finalement été peints en polychromie par une artiste peintre.

Les mesures de protection à long terme

La conservation préventive des œuvres d'art extérieures nécessite des mesures soutenues ; des recommandations à cet égard ont été données. Les sculptures doivent être protégées de la pluie dans la mesure du possible. Si, par malchance, des fissures apparaissaient, il serait important de faire des retouches pour les sceller. Le sol de l'édicule, qui est en béton, doit être peint pour éviter le transfert d'humidité, et les statues doivent être légèrement surélevées (sur de petits blocs ou « patins ») afin de favoriser une meilleure aération. Les arbres et arbustes à proximité de l'édicule doivent être taillés fréquemment pour éviter l'accumulation d'humidité.

Si les statues devaient être exposées à l'extérieur pendant l'hiver, il faut, pour les mêmes raisons, éviter l'accumulation de neige. Si elles sont à l'abri, ce doit être dans un édifice bien aéré, ni sec, ni trop humide, ni surchauffé. Finalement, il est primordial de procéder régulièrement à un examen des œuvres afin de s'assurer de leur bon état et de prévoir rapidement des correctifs, si nécessaire.

Le Centre de conservation du Québec a aussi restauré le Chemin de croix extérieur grandeur nature, sculpté en pierre, pour l'Ermitage Saint-Antoine ; un autre défi de taille.

Date de mise à jour : 14 décembre 2011

Gouvernement du Québec, 2021
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