Centre de conservation du Québec
Agrandir/Réduire la police

Réalisations

AccueilRéalisationsDétail d'une réalisation
 

Miracle d'une Pêche miraculeuse!

En 1907, Havre-Saint-Pierre célèbre ses 50 ans. Pour souligner l'événement, les paroissiens s'offrent une grande œuvre pour orner le chœur de leur église. L'artiste choisi est Jules Joseph Scherrer (1867-1936), lui-même d'Havre-Saint-Pierre. Inspiré de Jacques Tissot, il réalise une immense Pêche miraculeuse (3,70 m x 3,40 m), sujet d'actualité pour un village de pêcheurs. Malheureusement, en 1960, l'église et le presbytère sont démolis et les objets religieux qu'ils contiennent, dispersés.

C'est seulement en 2003 que deux employés de la Société historique de Havre-Saint-Pierre la découvrent, tapie dans un coin sombre et humide du grenier de leur centre d'interprétation, pliée sans soin dans tous les sens. L'œuvre est dans un piteux état ; il y a plusieurs lacunes de peinture, le vernis est fortement assombri et elle est recouverte d'une épaisse couche de saleté. Malgré tout, elle est toujours reconnaissable.

Traitement majeur pour peinture oubliée

L'oeuvre Pêche miraculeuse, à son arrivée au CCQ.C'est donc dans cet état précaire, sans châssis, sans cadre et roulée sur un tube en plastique de 11 cm de diamètre, qu'elle débarque au Centre de conservation en 2005. La demande est claire : proposer un traitement permettant la réintégration de cette œuvre magistrale.

Les restaurateurs estiment à plus de 300 heures les traitements nécessaires pour redonner son apparence de jeunesse à cette peinture oubliée.

La première étape consiste à dépoussiérer l'œuvre et consolider toute la couche picturale. Des bandes de toile provisoires sont ensuite installées à chaque extrémité à l'aide d'un adhésif activé à la chaleur. Ces bandes rallongent l'œuvre et permettent aux restaurateurs de l'enrouler sur des cylindres cartonnés (sonotubes) pour une meilleure accessibilité de toute sa surface.

La restauratrice procède à l'enlèvement du vernis jauni.C'est l'élimination du vernis excessivement jauni qui s'avère la tâche la plus longue. On découvre que plusieurs couches ont été appliquées dont une, encore plus coriace, contient de l'huile siccative. Deux campagnes d'enlèvement sont donc essentielles pour venir à bout de tout ce vernis. Fait étonnant, le vernis recouvrant la signature doit être laissé en place, celle-ci étant très soluble aux solvants employés pour le dévernissage. Ce détail amène les restaurateurs à se L'oeuvre installée sur le sonotube en cours de dégagement. questionner sur l'authenticité de la signature puisqu'elle est apposée par-dessus une couche de vernis et ne ressemble pas à celle de l'artiste retrouvée sur des tableaux de plus petit format. Malgré tout, dans le doute, mieux vaut la laisser telle quelle!

 

 

L'oeuvre avec une moitié roulée sur le sonotube et l'autre moitié sur la table chauffante.Une fois le dévernissage complété, les restaurateurs s'affairent à réparer les quelques petites déchirures de la toile. La toile entière doit ensuite être aplanie. Pour ce faire, un traitement d'humidification en deux étapes est réalisé, les dimensions de cette œuvre dépassant celle de la table chauffante de l'atelier. Une partie est donc roulée sur un sonotube et l'autre est installée, face couchée, sur la table. Une légère bruine d'humidité est vaporisée au revers, puis une séquence de déshumidication et de remise à plat est entreprise, permettant à la toile de se détendre. Un doublage de la toile est fait. Une pellicule d'adhésif, activé à la chaleur, est posée au revers avec deux bandes verticales de toile. Le tableau est ensuite roulé sur un sonotube et traité en deux sections sur la table chauffante.

 

Le restaurateur en cours de retouche dans le ciel.

Pour terminer le traitement de la peinture, les restaurateurs réalisent les masticages, la retouche et le vernis final. Si, au départ, ils croyaient que la retouche suffirait à combler les lacunes, ils découvrent que celle-ci sera insuffisante au niveau esthétique. Ils procèdent donc au masticage de plusieurs lacunes à l'aide d'un mortier de structure acrylique. Ces masticages sont ensuite colorés avec des couleurs acryliques, puis avec un liant en résine PVA et des pigments secs. Pour l'eau et le ciel, la retouche finale est faite avec un aérographe et des couleurs acryliques, permettant d'unifier les nombreuses zones lacunaires. Finalement, un vernis protecteur est appliqué au pistolet sur toute la surface du tableau.

Fabrication "sur mesure"

Le châssis, double et pliable, réalisé spécifiquement pour la peinture.À son arrivée au CCQ, l'œuvre ne possède pas de châssis ni d'encadrement. Un nouveau châssis, double et pliable, ainsi qu'un cadre démontable sont spécialement conçus par un ébéniste. Une caisse de transport est également créée spécifiquement pour cette œuvre. 

L'ébéniste fabrique le châssis.L'oeuvre est mise en caisse pour son retour à l'église.

 

Retour remarqué

C'est en juin 2007, lors d'une grande messe dominicale, que le tableau est dévoilé aux paroissiens. Cet événement souligne le 150e anniversaire de la création du village. Tous s'entendent pour dire que cette restauration est… miraculeuse!L'oeuvre après restauration avec son nouveau cadre.

 

Date de mise à jour : 14 décembre 2011

Gouvernement du Québec, 2021
© Gouvernement du Québec, 2021