La céramique est utilisée depuis des millénaires dans toutes les civilisations pour produire tant des objets utilitaires qu'une variété d'œuvres artistiques. En art public, notamment au Québec, elle prend différentes formes : sculpture, paroi murale, relief mural, œuvre au sol.
En Amérique du Nord, avant 1930, elle a également été utilisée en architecture comme parement. Ce matériau pare-feu peu coûteux permettait de varier les décors, les reliefs, les textures, les couleurs et les degrés de brillance.
Composée d'argile, la céramique est un matériau plastique et modelable qui se modifie de façon irréversible sous l'action de la chaleur. Lors de la cuisson, elle devient dure et conserve la forme et le décor qui lui ont été donnés. Elle peut alors être recouverte ou non d'une glaçure, c'est-à-dire d'un revêtement vitrifié pouvant être coloré, qui lui donne un aspect brillant.
Il existe une grande variété de terres argileuses. Leur nature influence les propriétés de la céramique. L'argile prend une teinte allant du blanc crème au brun noir, en passant par le beige chaud, le rouge et le brun, selon les minéraux qui la composent.
Les éléments de la vie (1980) d'André Léonard, au-dessus des voies de la station Université de Montréal, dans le métro de Montréal.
Ici, l'artiste et architecte a utilisé différentes pièces de terracotta, jouant avec leurs formes et dimensions, ainsi qu'avec leur couleur naturelle de terre cuite.
Photo 1 : France Rémillard, CCQ.
Pour donner les propriétés voulues à la pâte, les céramistes peuvent lui ajouter des dégraissants et des fondants. Leur présence et leur nature modifient le comportement de la céramique durant son façonnage et sa cuisson ainsi que les propriétés du produit fini, comme sa porosité.
L'argile modelable contient une part importante d'eau. C'est pourquoi elle doit sécher avant d'être cuite. Lors de cette étape, elle subit la moitié (environ 6 %) de son retrait, c'est-à-dire que ses dimensions diminuent. Elle est ensuite cuite dans un four où la température s'élève progressivement avant d'atteindre sa température finale. Le retrait se complétera au cours de sa cuisson (jusqu'à 15 %).
Les caractéristiques finales de la céramique dépendent de :
Une caractéristique importante à considérer dans la conservation des œuvres en céramique est leur porosité et leur taux de vitrification. Selon la composition de la pâte et la température atteinte, l'argile se vitrifie à un degré plus ou moins important lors de la cuisson ou reste poreuse.
Type de pâte | Intensité de la température | Porosité |
argile crue | séchage au soleil | 50 % = pâte très poreuse |
argile commune, faïence | basse température (700-750 °C) | jusqu'à 15 % = pâte poreuse |
température moyenne (1000-1200 °C) | de 6 à 10 % = pâte poreuse | |
grès | haute température (1200-1300 °C) | de 1 à 2 % = partiellement vitrifié |
porcelaine | très haute température (1300-1400 °C) | moins de 1 % = vitrifié |
D'après Berducou, 1990
a) porcelaine
b) grès
c) argile commune.
Une goutte d'eau déposée sur la porcelaine (a) et sur le grès (b) perle, ce qui indique que ces céramiques sont peu poreuses et donc très vitrifiées. Elles ont donc été cuites à haute température. Au contraire, l'eau pénètre rapidement dans l'argile commune (c), indiquant qu'elle est très poreuse et cuite à basse température.
Photos 2, 3 et 4 : CCQ
Appliquée à la surface de la céramique, la glaçure forme une couche vitreuse, brillante ou mate, au cours de la cuisson. Elle est utilisée pour son effet décoratif ou pour imperméabiliser la céramique.
La glaçure est constituée des mêmes éléments que le verre (généralement de la silice, des fondants et des stabilisants). Les couleurs associées aux glaçures sont obtenues grâce à l'ajout de composés métalliques. Selon leur concentration, leur association à d'autres matériaux, les conditions de cuisson de la pièce et les techniques d'application de la glaçure, une variété impressionnante d'effets et de couleurs peuvent être obtenus.
La glaçure est appliquée sur une pièce ayant subi une première cuisson. Bien réussie, elle devrait fusionner avec le corps de la céramique, ce qui lui assure une bonne adhérence.
Sans titre (1966) de Claude Vermette. Détail d'un polyptique constitué de douze éléments muraux ornant le quai de la station Saint-Laurent, dans le métro de Montréal.
Le céramiste Claude Vermette a utilisé des glaçures de différentes couleurs et de différentes textures, juxtaposant des effets brillants et mats.
Photo 5 : CCQ
Exemple d'effets possibles avec la glaçure.
Photo 6 : CCQ
Important
On observe généralement des tensions entre le corps céramique et la glaçure. Pour que l'œuvre dure longtemps, le corps de la céramique et la glaçure doivent avoir des coefficients de dilatation thermique (a) semblables. Ces coefficients sont déterminés par leur composition respective.
Voici deux exemples (A et B) de comportement d'une pièce de céramique avec glaçure, où les différences de coefficient de dilatation thermique entre le corps céramique et la glaçure peuvent être problématiques :
Pour que l'œuvre soit plus durable, en particulier si elle est destinée à un environnement extérieur, il est préférable que la glaçure se trouve légèrement en compression.
D'après Prudon, 1981
Pour concevoir des céramiques selon des méthodes artisanales, le céramiste doit faire preuve d'un grand savoir-faire. Il doit maîtriser tous les facteurs qui influencent le résultat final et ses propriétés en fonction de la destination de l'objet. Le céramiste pourra laisser aller son imagination quant aux formes et aux décors possibles.
La qualité des ingrédients est toujours un élément clé dans la fabrication de la céramique, surtout pour les œuvres conçues pour l'extérieur. Les résultats peuvent être désastreux si :
Toutes ces conditions sont essentielles pour l'obtention d'un produit impeccable. En particulier, sous l'effet des cycles de gel-dégel, toute imperfection, même peu perceptible au départ, diminuera l'espérance de vie du matériau.
Les recherches en ingénierie menées sur la céramique au cours du XXe siècle ont conduit à l'apparition de nouvelles techniques pour la confection industrielle de céramiques. Elles présentent les caractéristiques suivantes.
Parmi les produits de céramique issus de l'industrie, les carreaux destinés au parement des murs et des planchers sont les plus utilisées. Une variété de produits sont proposés pour des usages précis (revêtement mural ou pour le plancher, intérieur ou extérieur, etc.).
Plusieurs aspects doivent être considérés lors de la conception d'une œuvre murale ou d'un plancher en céramique afin de lui assurer les meilleures conditions de conservation.
Les conditions de conservation des œuvres en céramique varient selon que l'œuvre est installée dans un environnement intérieur ou extérieur. À l'intérieur, les œuvres en céramique présentent une stabilité remarquable. L'environnement extérieur est beaucoup plus exigeant pour les céramiques, particulièrement à cause des cycles de gel-dégel du climat nord-américain. À ce sujet, consulter la section Pour protéger les céramiques de l'action de l'eau et des cycles de gel-dégel.
La fonction du lieu peut influencer le choix de l'emplacement de la murale. Par exemple, une murale de céramique installée sur le mur arrière d'une école donnant directement sur le terrain de jeu des écoliers est susceptible de recevoir fréquemment des balles ou autres projectiles qui pourraient l'endommager.
Les types de céramique sont nombreux. On en distingue deux catégories : la céramique de production artisanale et la céramique industrielle. On peut aussi opter pour une combinaison des deux. À ce sujet, consulter la section Céramique artisanale ou industrielle.
1. La céramique de conception artisanale permet une vaste gamme d'effets artistiques (couleurs, formes, textures, types de glaçure). Lors de la réalisation, l'artiste doit prévoir le retrait des pièces d'argile à la cuisson.
Détail de la céramique (1963) de Jordi Bonet sur une façade extérieure de l'école Saint-Michel, à Québec.
Photo 8 : CCQ.
2. Les céramiques industrielles adoptent des formats standardisés et des choix de couleurs plus limités. Les tuiles peuvent cependant être agencées ou retaillées afin de servir le dessein artistique.
Détail d'une paroi intitulée Jazz (1989), de Pierre Hardy, au Complexe Héritage, à Gatineau.
Photo 9 : Mireille Nolet, MCC.
3. L'artiste peut utiliser des carreaux de céramique industrielle et appliquer lui-même la glaçure selon son idée originale. Tout en servant l'expression artistique, cette option permet de travailler en fonction des propriétés connues d'une céramique industrielle. Il faut cependant que les glaçures soient adaptées au corps de la céramique.
Sans titre (1962). Détail des céramiques d'Yves Trudeau, à l'extérieur de la piscine À la claire Fontaine de Sherbrooke.
Photo 10 : CCQ.
Lorsque la céramique est posée au moment de la construction du mur de support :
Lorsque la céramique est posée sur un mur existant :
Les carreaux de céramique sont fixés au mur à l'aide d'un mortier de pose ou de ciment-colle. Voici quelques précautions à adopter lors du choix et de la préparation du produit :
Les mesures suivantes peuvent accroître la solidité de l'œuvre :
Un coulis ou un mortier de jointoiement est généralement appliqué entre les carreaux. Si la murale est à l'intérieur, l'artiste peut décider de ne pas en mettre. C'est ce qu'on appelle un assemblage à « joints secs ». Si la murale est à l'extérieur, il est impératif d'appliquer un coulis dans le joint entre les carreaux. Il scellera la surface et préviendra les infiltrations d'eau. Pour obtenir plus de détails sur les mortiers, consulter la section Béton du présent guide.
Le mortier de jointoiement doit être :
Le pourtour de l'œuvre doit être bien scellé. Un solin au-dessus des carreaux supérieurs est un moyen efficace de protéger la murale contre les infiltrations d'eau.
Pour les œuvres de très grand format, il faut inclure des joints de dilatation à intervalles de 12' à 25'. Ces joints absorberont les tensions créées par les changements de dimensions des carreaux causées par des variations de température et d'humidité, qui causent des décollements ou des bris de carreaux.
La pose devrait être réalisée par un carreleur ou un maçon professionnel. De nombreux matériaux de pose sont aujourd'hui offerts sur le marché. En général, les matériaux de meilleure qualité sont plus durables. Il faut se référer à la fiche technique du produit pour connaître ses propriétés et ses performances. Il est important de respecter les consignes d'application.
Types de céramique
Les céramiques destinées à la pose au sol doivent présenter différents critères.
Les matériaux de pose doivent être conçus pour une installation au sol.
Préparation du support
Le sol doit être préparé convenablement.
Consulter un architecte ou un ingénieur pour s'assurer que le support est adéquat pour ce type d'installation ou pour obtenir des conseils sur la pose à l'extérieur.
La mosaïque
Une mosaïque est un assemblage de petites pièces rapportées (pierre, marbre, terre cuite, smalt, céramique, coquillage, verre, etc.) avec un ciment et dont la juxtaposition compose un motif. Cette technique d'assemblage peut être employée avec la céramique, mais n'est pas propre à ce matériau.
Elle diffère dans le mode d'assemblage à cause de la taille des pièces. Elles peuvent être mises en place directement sur leur support (mur, sol ou autre), mais le plus souvent, elles seront d'abord fixées sur un support temporaire ou permanent (par exemple, un filet) pour être ensuite transférées à leur emplacement final (méthode de pose indirecte). Cette technique est entre autres utilisée pour la réalisation d'œuvres de grand format, car elle permet de préparer des sections en atelier, ce qui simplifie le montage in situ.
Lors de la réalisation d'une mosaïque :
Mosaïque de Gabriel Bastien et Andrea Vau, réalisée en 1969, à la station Sherbrooke du métro de Montréal.
Photos 12 et 13 : CCQ.
Une murale de céramique installée à l'intérieur peut se conserver longtemps et facilement. Les principaux facteurs de dégradation sont :
À l'extérieur, le choix des matériaux est déterminant dans la conservation de l'œuvre. Aux facteurs de dégradation auxquels les œuvres intérieures sont sujettes s'ajoutent l'action de l'eau et l'action du gel.
Céramiques pour l'intérieur ou pour l'extérieur
Certaines céramiques sont conçues pour mieux résister aux conditions extérieures, alors que d'autres ne devraient être conservées qu'à l'intérieur. En général, les céramiques dont la porosité est fermée (degré de vitrification élevé, comme la porcelaine) résisteront mieux aux conditions extérieures (voir section Action de l'eau et du gel).
L'eau et les cycles de gel/dégel sont les principaux facteurs de dégradation de la céramique à l'extérieur. Ils affectent davantage les céramiques poreuses.
En gelant, le volume de l'eau augmente d'environ 9 %. Aux endroits où elle s'est infiltrée, l'eau risque de causer des dommages en gelant, dont :
La glaçure fissurée permet à l'eau de s'infiltrer et alimente le processus de dégradation lors des cycles de gel/dégel, conduisant à l'écaillage (photo de gauche) ou à des pertes de matières plus importantes, telles que le délitage (photo du centre) ou la perte de tesselles (photo de droite).
Photos 14, 15 et 16 : CCQ.
L'eau peut entraîner des sels solubles présents dans la maçonnerie ou dans le sol (remontées capillaires, mauvais drainage). Ces sels favorisent l'apparition d'efflorescences. Ces dernières forment un film blanchâtre inesthétique et peuvent altérer la surface en causant des éclats de la glaçure et du corps céramique.
Traces d'efflorescences au bas d'une murale de céramique. Elles sont causées par un problème d'infiltration d'eau à l'arrière du mur. Dans ce cas, la formation des cristaux de sel fait éclater la surface de la céramique.
Photo 17 : CCQ.
Des colonisations biologiques, notamment des algues et du lichen, peuvent s'installer aux endroits qui ne s'assèchent pas. Elles peuvent même se développer entre le corps céramique et la glaçure, si l'œuvre est fissurée.
Formation d'algues sous la glaçure (photo de gauche) et de mousses dans le mortier (photo de droite) dans des zones qui ne s'assèchent pas.
Photos 18 et 19 : CCQ.
Le coulis ou le mortier de jointoiement et le mortier de pose ou le ciment-colle sont également vulnérables à l'action de l'eau et aux cycles de gel/dégel. Il est donc important de choisir des produits adaptés à un environnement extérieur, le cas échéant.
Pour protéger les céramiques de l'action de l'eau et des cycles de gel-dégel
Tout problème structural lié au bâtiment, comme la fissuration d'un mur attribuable au mouvement du sol ou le tassement de la maçonnerie, se répercute sur la murale de céramique. Avec le temps, le problème peut se traduire par de longues fissures traversant plusieurs carreaux.
Important
En cas de doute sur la présence d'un problème structural lié au bâtiment, faire inspecter par un ingénieur en bâtiment ou un architecte.
Détail d'une mosaïque de Joseph Iliu, réalisée en 1956, sur une façade extérieure d'une école de la Commission scolaire de Montréal.
Cette grande fissure, les bris et les pertes de carreaux résultent d'un problème structural lié au mur sur lequel la céramique est posée.
Photo 20 : CCQ, Colombe Harvey.
Différents facteurs relatifs aux matériaux et à leur pose sont susceptibles de raccourcir la vie de l'œuvre, dont :
Pour prévenir les défauts de fabrication ou de pose
La céramique est un matériau dur et cassant. Un impact est susceptible de faire éclater la surface d'un carreau ou de causer son décollement. En tombant, le carreau risque de se casser. Les impacts peuvent provenir d'actes de vandalisme ou être accidentels (par exemple, causés par des chariots ou des échelles).
Exemple d'arêtes en saillie endommagées (taches blanches) par le rangement de matériel devant l'œuvre, entraînant des impacts répétitifs qui ont causé des pertes de glaçure.
Photo 21 : CCQ.
La céramique est altérée par les graffitis peints ou gravés avec une pointe dure. Les graffitis peints sont difficiles à retirer sur toutes les parties poreuses de la murale de céramique, c'est-à-dire sur la céramique sans glaçure, le coulis ou le mortier de jointoiement.
Exemple de graffiti gravé dans la glaçure. Garder les lieux propres pour éviter l'utilisation d'objets tranchants pouvant permettre de réaliser des graffitis.
Photo 22 : CCQ.
Pour protéger du vandalisme et des bris accidentels
Dès la conception:
Pour protéger l'oeuvre contre les interventions inadéquates
Consulter un restaurateur professionnel en cas de :
Les propriétaires d'œuvres de céramique devraient :
Pour en savoir plus sur l'élaboration d'un programme d'entretien, consulter la section Élaboration d'un programme d'entretien de ce guide.
Il est essentiel de conserver au dossier de l'œuvre l'information sur les matériaux qui la constituent et sur les techniques de réalisation, entre autres dans le cas où l'œuvre aurait subi des dommages.
Pour les carreaux industriels :
Pour les carreaux de production artisanale :
Dans tous les cas :
Une inspection annuelle permet de suivre l'état de conservation et d'intervenir, si nécessaire. Au moment d'inspecter l'œuvre, il faut porter attention aux éléments suivants :
En cas de bris ou de chute de carreaux
Suivre la fiche d'entretien de l'œuvre. En l'absence d'une telle fiche, en faire produire une par un restaurateur qualifié. Voir aussi la fiche Modèle de fiche d'entretien dans la Boîte à outils.
Pour les œuvres extérieures, s'assurer que l'étanchéité soit optimale en :
Date de mise à jour : 13 juin 2016